14) Paul, l’Apôtre des Nations
« Je me suis fait tout à tous, afin d'en sauver à tout prix quelques-uns. » (1 Co 9,22)
Il n'a pas connu directement Jésus vivant, à Jérusalem ou sur les routes de Galilée ou de Judée, comme les Douze Apôtres ou les saintes femmes. Il est le premier à avoir eu la seule expérience du Ressuscité, comme tous les chrétiens l’auront après lui. Et pourtant, il fut l’un des plus ardents annonciateurs de l'Evangile. Il est présent dans une vingtaine de chapitres du livre des Actes des Apôtres... Il a écrit des lettres à diverses communautés chrétiennes et à des amis (treize épîtres se réclament de lui)... Presque chaque dimanche, la liturgie de la Messe nous en propose des passages (ces textes ne sont pas toujours évidents à saisir, d’ailleurs). Cet homme, on le surnomme l’« Apôtre des Gentils » – Gentils : du latin Gens-Gentis, race, peuple ; Paul a prêché surtout aux non-juifs –, c’est-à-dire des « Nations » : Paul de Tarse.
L’Apôtre le mieux connu
Paul est le personnage le mieux connu de la première génération chrétienne, à la fois par ses Lettres et par le récit de sa vie que saint Luc nous donne dans les Actes des Apôtres. Bien que comportant quelques divergences, ces deux témoignages se complètent et se confirment. De plus, on peut établir une chronologie assez précise de la vie de Paul ; en effet, des évènements historiques connus se retrouvent dans les Actes des Apôtres. Quelques lettres (sept) dont nous sommes quasiment sûr qu’il en est l’auteur sont pour nous une source exceptionnelle. Ces lettres couvrent une quinzaine d’années de sa vie seulement. Quant aux Actes qui relatent son parcours, ils ont été écrits vingt ans après sa mort, avec la coloration apologétique de l’époque.
Saul, Juif de Tarse
Paul est donc né peu avant l’an 10 de notre ère, dans une famille juive de Tarse, en Cilicie (Turquie orientale actuelle). Il a reçu le nom biblique de « Saul » et le nom romain de « Paul », « Paulus » en latin. En fait, Paulus est un surnom romain qui signifie petit, faible. Cela a donné « Paulos » en grec. Son père avait acquis la citoyenneté romaine. Il fit ses études à Jérusalem. « Je suis Juif. Né à Tarse en Cilicie, j'ai cependant été élevé ici dans cette ville, c’est aux pieds de Gamaliel l’Ancien que j’ai été formé à l’exacte observance de la Loi de nos Pères, rempli du zèle de Dieu. » (Ac 22,3) D’après les Actes, il était « Pharisien, fils de Pharisiens » (Ac 23,6), et « circoncis le huitième jour » (Ph 3,5-6).
Saul, le persécuteur
Pendant la fête de Shavouoth (la Pentecôte), les Apôtres, après avoir reçu l’Esprit-Saint, s’étaient mis à proclamer haut et fort que Jésus le Nazaréen, livré aux Romains et fait crucifier, était ressuscité des morts ! Ils annonçaient qu’il n'y avait sous le ciel d'autres noms que celui de Jésus par lequel les hommes seraient sauvés !
Saul est arrivé à Jérusalem quelques années après la Pentecôte.
Le Sanhédrin, c'est-à-dire le conseil des grands prêtres et des maîtres de la Loi avait bien fait arrêter Pierre et ses compagnons, mais ils persistaient à parler de la mort et de la résurrection du Christ, heureux même d'avoir été jugés dignes de souffrir pour le nom de Jésus !
Tout a véritablement débuté avec l'arrestation et la mort par lapidation du diacre Étienne. A son martyre, « les témoins avaient déposé leur manteau auprès d’un jeune homme appelé Saul… Il était de ceux qui approuvaient ce meurtre et déclenchèrent une violente persécution contre l’Église. Saul, lui, approuvait ce meurtre. En ce jour-là, une violente persécution se déchaîna contre l'Église de Jérusalem. » (Ac 7,58-8,1) Saul montra un zèle tout particulier et, « ne respirant toujours que menaces et carnage à l'égard des disciples du Seigneur, alla trouver le grand prêtre et lui demanda des lettres pour les synagogues de Damas, afin que, s'il y trouvait quelques adeptes de la Voie, hommes ou femmes, il les amenât enchaînés à Jérusalem. » (Ac 9,1-2)
Il me vient tout de suite à l’esprit le tableau du Caravaggio (1573-1610) peint en 1600-1601 que l’on peut admirer dans l’église Santa Maria del Popolo à Rome. Saul « faisait route et approchait de Damas, quand soudain une lumière venue du ciel l'enveloppa de sa clarté. Tombant à terre, il entendit une voix qui lui disait : “Saoul, Saoul, pourquoi me persécutes-tu ? ” - “Qui es-tu, Seigneur ? ” demanda-t-il. Et lui : “Je suis Jésus que tu persécutes. Mais relève-toi, entre dans la ville, et l'on te dira ce que tu dois faire.” » (Ac 9,3-6) Pour Saul, une aventure extraordinaire commençait… Une équipée qui le mènerait d’un chemin poussiéreux de Damas à la gloire du martyre dans la Capitale du monde romain ! Cet événement fut tellement important pour lui, qu’il le racontera plusieurs fois.
« Saul se releva donc de terre, mais, quoiqu'il eût les yeux ouverts, il ne voyait rien. On le conduisit par la main pour le faire entrer à Damas. Trois jours durant, il resta sans voir, ne mangeant et ne buvant rien. » (Ac 9,8-9) C’est un nommé Ananie qui fut envoyé par le Seigneur à Saul pour lui imposer les mains afin de lui rendre la vue. Ananie eut quelques réticences ; il connaissait en effet la réputation de Paul et le but de sa venue. « Mais le Seigneur lui dit : “Va, car cet homme m'est un instrument de choix pour porter mon nom devant les nations païennes, les rois et les Israélites. Moi-même, en effet, je lui montrerai tout ce qu'il lui faudra souffrir pour mon nom.” (Ac 9,15-16) Ananie partit, entra dans la maison où demeurait Saul, lui imposa les mains « et lui dit : “Saoul, mon frère, celui qui m'envoie, c'est le Seigneur, ce Jésus qui t'est apparu sur le chemin par où tu venais ; et c'est afin que tu recouvres la vue et sois rempli de l'Esprit Saint.” Aussitôt il lui tomba des yeux comme des écailles, et il recouvra la vue. Sur-le-champ il fut baptisé ; puis il prit de la nourriture, et les forces lui revinrent. Il passa quelques jours avec les disciples à Damas, et aussitôt il se mit à prêcher Jésus dans les synagogues, proclamant qu'il est le Fils de Dieu. » (Ac 9,17-20)
On ignore la date de cet événement capital ; la lettre aux Galates pourrait indiquer les années 33-35, peu après la constitution de la première Église, à Jérusalem, assemblée autour de « Pierre, avec les Onze ».
Saul, Juif et Chrétien
Cette « conversion » radicale de Saul ne fut pas pour lui un changement de religion. Il se sentira toujours juif, car c’est le « Dieu des Pères » qui l’a envoyé prêcher l’Evangile. L’évangélisateur des païens continuera à prêcher aux Juifs quand cela sera possible, jusqu’à son ultime appel, à Rome. La conversion et le baptême de Paul signifient qu’il a découvert sa juste et vraie place dans la vie d’Israël.
Que tous ses frères Juifs ne reconnaissent pas Jésus comme le Messie, le Fils de Dieu, aura été sans doute pour lui une de ses plus grandes souffrances ! Lisons ce qu’il en dit dans sa Lettre aux Romains : « Je dis la vérité dans le Christ, je ne mens point – ma conscience m'en rend témoignage dans l'Esprit Saint –, j'éprouve une grande tristesse et une douleur incessante en mon cœur. Car je souhaiterais d'être moi-même anathème, séparé du Christ, pour mes frères, ceux de ma race selon la chair, eux qui sont Israélites, à qui appartiennent l'adoption filiale, la gloire, les alliances, la législation, le culte, les promesses et aussi les patriarches, et de qui le Christ est issu selon la chair, lequel est au-dessus de tout, Dieu béni éternellement ! Amen. » (Rm 9,1-5) Pour Paul, il était clair qu'en Jésus la Loi et les Prophètes s'accomplissaient et prenaient leur vrai sens en lui !
Et Saul en a dit des phrases, et il en a fait des kilomètres, et il en a reçu des coups ! Il a annoncé le Nom de Jésus Christ dans des dizaines de synagogues de l'Empire romain ! Il a parlé de la Sagesse de son Dieu aux philosophes et aux païens ! Il a parcouru la Méditerranée « en long, en large et en travers ». Il a traversé la Grèce, la Turquie, l'Italie, la Syrie... Il est allé à Chypre, à Malte !... Il a été emprisonné plusieurs fois, enchaîné, battu, lapidé et laissé pour mort, calomnié, bafoué, victime d'une terrible tempête en mer, naufragé... Mais il n'a jamais faibli et ses compagnons non plus! Animés d'une force invincible, celle du Seigneur Jésus, il a tenu bon ! Mais ce trésor inestimable, cette perle incomparable, il l’a portée dans un vase d'argile, pour que cet excès de puissance soit de Dieu et ne vienne pas de lui !
C’est au chapitre 13 des Actes des Apôtres que Saul prendra son nom latin de « Paul » (Ac 13,9).
Finalement, après bien des péripéties que Luc a raconté dans les Actes, Paul s’est retrouvé à Rome, en « liberté surveillée » ! Il a loué un logis où il recevait tous ceux qui venaient le trouver, « proclamant le Royaume de Dieu et enseignant ce qui concerne le Seigneur Jésus Christ avec pleine assurance et sans obstacle. » (Ac 28,31) Mais n’anticipons pas trop vite !
Rencontre entre Pierre et Paul à Jérusalem
Dans la Tradition de l’Eglise, les deux Apôtres, ces deux colonnes de l’Eglise, ont toujours été associés, preuve en est faite par les fêtes des Saints Pierre et Paul célébrées dans une même Solennité, le 29 juin.
Ecoutons Paul maintenant nous parler dans sa Lettre au Galates de la suite des événements : « Sachez-le, en effet, mes frères, l'Évangile que j'ai annoncé n'est pas à mesure humaine : ce n'est pas non plus d'un homme que je l'ai reçu ou appris, mais par une révélation de Jésus Christ. Vous avez certes entendu parler de ma conduite jadis dans le judaïsme, de la persécution effrénée que je menais contre l'Église de Dieu et des ravages que je lui causais, et de mes progrès dans le judaïsme, où je surpassais bien des compatriotes de mon âge, en partisan acharné des traditions de mes pères. Mais quand Celui qui dès le sein maternel m'a mis à part et appelé par sa grâce daigna révéler en moi son Fils pour que je l'annonce parmi les païens, aussitôt, sans consulter la chair et le sang, sans monter à Jérusalem trouver les apôtres mes prédécesseurs, je m'en allai en Arabie, puis je revins encore à Damas. Ensuite, après trois ans, je montai à Jérusalem rendre visite à Képhas et demeurai auprès de lui quinze jours : je n'ai pas vu d'autre apôtre, mais seulement Jacques, le frère du Seigneur. » (Ga 1,11-19)
Trois ans après, Paul monta donc à Jérusalem faire la connaissance de Képhas (la « tête », en grec), – le nom qu’il donne toujours à Pierre – et demeura auprès de lui quinze jours. Sans doute, celui-ci lui enseigna-t-il la tradition orale relative à Jésus, que Paul n’a pas connu (sinon dans la révélation faite à sa conversion), ainsi qu’une interprétation christologique des Prophètes, selon l’enseignement du Maître au milieu de ses disciples. Est-ce là qu’il reçut lui-même la Tradition qui vient du Seigneur qu’il transmit aux autres et dont il parle dans sa première Lettre aux Corinthiens ? « Pour moi, en effet, j'ai reçu du Seigneur ce qu'à mon tour je vous ai transmis : le Seigneur Jésus, la nuit où il était livré, prit du pain et, après avoir rendu grâce, le rompit et dit : “Ceci est mon corps, qui est pour vous ; faites ceci en mémoire de moi.” De même, après le repas, il prit la coupe, en disant : “Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang ; chaque fois que vous en boirez, faites-le en mémoire de moi.” Chaque fois en effet que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne. » (1 Co 11,23-26)
La visite de Paul à Jérusalem fut discrète : à part Pierre, le seul autre dirigeant de l’Église que Paul vit fut Jacques. Paul s’est enrichi auprès de l’Église-mère, mais n’a pas réussi à s’y intégrer, probablement à cause de son passé... Il échappa même à une tentative d’assassinat de la part des hellénistes, qu'il pourchassa quelques années plus tôt. Du coup, on le fit partir à Tarse. Tout ceci fut pour lui des années de maturation personnelle.
Début de l’aventure missionnaire
Au début des années 40, Barnabé, un disciple, fêté comme Apôtre le 11 juin, fut envoyé par l’Église de Jérusalem à Antioche de Syrie pour reprendre en mains cette Église fondée par les missionnaires hellénistes chassés de Jérusalem. Il vint chercher à Tarse l’aide de Paul. « L'ayant trouvé, il l'amena à Antioche. Toute une année durant ils vécurent ensemble dans l'Église et y instruisirent une foule considérable. » (Ac 11,26a) Ils y annoncèrent l’Evangile avec succès. C’est la première sortie du cadre juif car Paul prêcha aussi à des Grecs. Une communauté mixte se constitua donc. « C’est à Antioche que, pour la première fois, les disciples reçurent le nom de “chrétiens”. » (Ac 11,26b) L’ « invention » de ce titre de chrétiens est certainement l’un des plus beaux fruits de la prédication de Paul dans cette ville.
L’Eglise d’Antioche allait être désormais le centre de diffusion de l’Évangile, et vivre indépendante du Temple de Jérusalem et de la vie en Judée.
Que l’Apôtre saint Paul nous donne ou nous redonne de porter avec joie et fierté le beau nom de Chrétiens, autres Christs !
« Je me suis fait tout à tous, afin d'en sauver à tout prix quelques-uns. » (1 Co 9,22)
D’après plusieurs traditions, certains Apôtres auraient voyagé très loin pour annoncer l’Evangile. Saint Thomas serait allé jusqu’en Inde. Saint André aurait parcouru les côtes de la Mer Noire et serait mort en Grèce. Saint Jude se serait rendu en Arménie, saint Matthieu en Ethiopie, saint Simon en Perse… Pour Paul, les Actes des Apôtres, ses Lettres et la saine Tradition de Rome garantissent l’authenticité de ses voyages.
Après sa « conversion » sur la route de Damas, Paul sillonna une partie de l’Asie Mineure (Turquie actuelle), de la Syrie et de l’Arabie (actuelle Jordanie), jusqu’à Jérusalem, avant de passer en Europe, en Grèce, puis à Rome. On peut raisonnablement dater ses voyages dans un intervalle de quelques années autour de l'année 50. Paul a effectué quatre voyages.
Son premier voyage le mène d’Antioche à Chypre ainsi qu’au sud de l’Anatolie. Paul et Barnabé prêchent avec force la Bonne Nouvelle de la Résurrection et du salut en Jésus dans les synagogues et fondent plusieurs communautés. Une division s’installe entre les Juifs. Quant à Paul, il se tourne, aussi, vers les païens.
Son deuxième voyage a pour but de rencontrer les communautés qu’il a créées en Anatolie du sud (Turquie). Il est accompagné de Silas. Là-bas, il rencontre Timothée qui continuera le voyage avec eux. Ils poursuivent vers le nord-ouest, jusqu’aux Dardanelles, à Troie, d’où ils passent en Grèce. Paul fonde des Églises à Philippes, Thessalonique, Bérée, Athènes et Corinthe. Il retourne ensuite à Antioche, sa base, en passant par Éphèse et Césarée. Comme nous l’avions dit dans l’article précédent, « c’est à Antioche que, pour la première fois, les disciples reçurent le nom de “chrétiens”. » (Ac 11,26b)
Le quatrième et dernier voyage est celui de la captivité. Le périple du prisonnier à Rome n'est pas à proprement parlé un voyage missionnaire, mais son activité d'évangélisateur ne cessera pas pour autant.
Vers l’an 50, se posa à Antioche la question de l’opportunité de la circoncision pour les non-juifs. En effet, des chrétiens arrivés de Judée dénonçaient la « liberté acquise dans le Christ Jésus », liberté que Paul et Barnabé invoquaient pour ne pas imposer ce rite aux Chrétiens issus du paganisme. Paul parlera souvent dans ses Lettres de ce problème, comme dans les Epîtres aux Galates et aux Corinthiens : « C'est pour que nous restions libres que le Christ nous a libérés. Donc tenez bon et ne vous remettez pas sous le joug de l'esclavage… En effet, dans le Christ Jésus ni circoncision ni incirconcision ne comptent, mais seulement la foi opérant par la charité… Car la circoncision n'est rien, ni l'incirconcision ; il s'agit d'être une créature nouvelle. » (Ga 5,1.6 ; 6,15) « La circoncision n'est rien, et l'incirconcision n'est rien ; ce qui compte, c'est de garder les commandements de Dieu. » (1 Co 7,19)
La communauté d’Antioche décida donc de demander l’arbitrage des Apôtres et des Anciens de Jérusalem. Elle députa Paul et Barnabé, ainsi que leur compagnon grec, Tite, accompagnés par une délégation. Apôtres et Anciens de Jérusalem acceptèrent Tite, « non-circoncis », reconnaissant par là la validité de l’annonce de Paul concernant la liberté de la grâce. Ils désignèrent aussi les principaux responsables de l’Église et reconnurent la vocation missionnaire de Pierre pour les circoncis, et de Paul pour les incirconcis, « car Celui qui avait agi en Pierre pour faire de lui un apôtre des circoncis, avait pareillement agi en moi en faveur des païens. » (Ga 2,8) Ce discernement fondait une sorte de partage du champ missionnaire : Pierre, Jacques, et Jean évangéliseraient les Juifs, Paul et Barnabé les païens. Ce moment important de la vie de l’Eglise primitive nous est raconté dans les Actes des Apôtres (Ac 151-35).
Paul revint une troisième fois à Jérusalem rendre compte aux Anciens de sa mission parmi les païens. Il était à la tête d’une délégation de personnes représentant les Eglises fondées par lui. Le groupe était formé de disciples venus du paganisme en général, mais aussi de disciples d’origine juive, tel Timothée. Paul était devenu le chef incontesté d’un groupe de communautés locales, qui avaient rompu, de fait, avec les synagogues et menaient au sein de la société païenne une existence autonome. Il exerçait l’autorité d’un Apôtre de Jésus-Christ, titre auquel il était très attaché. Il se présentera en tant que tel quasiment au début de chacune de ses Lettres, avec presque toujours une adresse différente : « Paul, serviteur du Christ Jésus, apôtre par vocation, mis à part pour annoncer l'Évangile de Dieu » (Rm 1,1) ; « Paul, apôtre du Christ Jésus par la volonté de Dieu » (2 Co 1,1) ; « Paul, apôtre, non de la part des hommes ni par l'intermédiaire d'un homme, mais par Jésus Christ et Dieu le Père qui l'a ressuscité des morts » (Ga 1,1) ; « Paul, apôtre du Christ Jésus selon l'ordre de Dieu notre Sauveur et du Christ Jésus, notre espérance » (1 Tm 1,1) ; « Paul, apôtre du Christ Jésus par la volonté de Dieu, pour annoncer la promesse de la vie qui est dans le Christ Jésus » (2 Tm 1,1) ; « Paul, serviteur de Dieu, apôtre de Jésus Christ pour amener les élus de Dieu à la foi et à la connaissance de la vérité ordonnée à la piété » (Tt 1,1).
Dans les Lettres, il revendiquera haut et fort sa qualité d’Apôtre : « Or je vous le dis à vous, les païens, je suis bien l'apôtre des païens et j'honore mon ministère » (Rm 11,13) ; « Ne suis-je pas libre ? Ne suis-je pas apôtre ? N'ai-je donc pas vu Jésus, notre Seigneur ? N'êtes-vous pas mon œuvre dans le Seigneur ? Si pour d'autres je ne suis pas apôtre, pour vous du moins je le suis ; car c'est vous qui, dans le Seigneur, êtes le sceau de mon apostolat » (1 Co 9,1-2) ; il jouera même au « faux-humble », si je puis m’exprimer ainsi : « Car je suis le moindre des apôtres ; je ne mérite pas d'être appelé apôtre, parce que j'ai persécuté l'Église de Dieu » (1 Co 15,9).
Arrivés à Jérusalem, Paul et ses compagnons furent reçus avec joie. Puis ils se rendirent chez Jacques, où tous les anciens se réunirent. Paul raconta ce que Dieu avait fait chez les païens par son ministère. Tous glorifièrent Dieu de ce qu'ils entendaient. Mais dans la capitale du judaïsme et devant l’Église de Jérusalem où « combien de milliers de Juifs ont embrassé la foi, et sont tous de zélés partisans de la Loi » (Ac 21,20b), il fut demandé à Paul de prouver son attachement aux Pères. On l’invita à se rendre au Temple : « Nous avons ici quatre hommes qui sont tenus par un vœu. Emmène-les, joins-toi à eux pour la purification et charge-toi des frais pour qu'ils puissent se faire raser la tête. Ainsi tout le monde saura qu'il n'y a rien de vrai dans ce qu'ils ont entendu dire à ton sujet, mais que tu te conduis, toi aussi, en observateur de la Loi. » (Ac 21,23-24)
C’est là qu’il sera arrêté…
L’arrestation de Paul
Paul s’était donc retrouvé dans le Temple de Jérusalem avec quatre hommes qui devaient accomplir un vœu. Mais, en quelque sorte, il était tombé dans un « guet-apens ». Les jours de purification arrivaient à leur terme, quand des Juifs d'Asie Mineure, l'ayant aperçu dans le Temple, ameutèrent la foule et s’emparèrent de lui. Ils se mirent à crier : « Hommes d'Israël, au secours ! Le voici, l'individu qui prêche à tous et partout contre notre peuple, contre la Loi et contre ce Lieu ! Et voilà encore qu'il a introduit des Grecs dans le Temple et profané ce saint Lieu. » (Ac 22,28) Auparavant, ils avaient vu un Éphésien, Trophime, avec lui dans la ville, et ils pensaient que Paul l'avait peut-être fait entrer dans le Temple. « La ville entière fut en effervescence, et le peuple accourut de toutes parts. On s'empara de Paul, on se mit à le traîner hors du Temple, dont les portes furent aussitôt fermées. » (Ac 21,30) Des hommes cherchèrent même à le mettre à mort ! Cependant, grâce à l’arrivée du tribun et d´une cohorte de soldats, Paul échappa à la mort, car « à la vue du tribun et des soldats, ils cessèrent de frapper Paul. » (Ac 21,32) Le tribun « ordonna de le lier de deux chaînes ; puis il demanda qui il était et ce qu'il avait fait. » (Ac 21,33) Paul fut amené à la forteresse. Là, sur les marches, il obtint du tribun l’autorisation de s’adresser à la foule. « La permission accordée, Paul, debout sur les degrés, fit de la main signe au peuple. Il se fit un grand silence. Alors il leur adressa la parole en langue hébraïque. » (Ac 21,40)
Il expliqua sa foi et sa fidélité de Juif formé à l’école de Gamaliel, et la rencontre bouleversante sur la route de Damas qui désormais dominait et inspirait sa vie. Puis, devant ces juifs de Jérusalem, il ajouta : « De retour à Jérusalem, il m'est arrivé, un jour que je priais dans le Temple, de tomber en extase. Je vis le Seigneur, qui me dit : “Hâte-toi, sors vite de Jérusalem, car ils n'accueilleront pas ton témoignage à mon sujet… Va ; c'est au loin, vers les païens, que moi, je veux t'envoyer”. » (Ac 22,17-18.21) Ces derniers mots enflammèrent de nouveau la foule. Le tribun le fit alors rentrer dans la forteresse afin de lui donner la question par le fouet pour savoir pour quel motif on criait ainsi contre lui.
Paul, citoyen romain
Quand on l'eut ligoté, Paul dit au centurion de service : « Un citoyen romain, et qui n'a même pas été jugé, vous est-il permis de lui appliquer le fouet ? » (Ac 22,25) Alerté par le centurion, le tribun vint immédiatement demander à Paul si il était citoyen romain ; Paul lui répondit que oui. « Le tribun reprit : “Moi, il m'a fallu une forte somme pour acheter ce droit de cité. ” - “Et moi, dit Paul, je l'ai de naissance. ” Aussitôt donc, ceux qui allaient le mettre à la question s'écartèrent de lui et le tribun lui-même eut peur, sachant que c'était un citoyen romain qu'il avait chargé de chaînes. » (Ac 22,28-29)
Les procès de Paul
Paul comparut à un premier procès devant le Sanhédrin (Conseil suprême doté de pouvoirs politiques, religieux et judiciaires, placé sous l'autorité du grand-prêtre). A la suite d’un complot de zélateurs juifs visant à le tuer, il fut transféré à Césarée-Maritime où eut lieu un deuxième procès, celui-là devant le Procurateur Félix (années 57-59). Le troisième procès se passa devant son successeur Festus, deux ans après. C’est là qu’il dit : « Je suis devant le tribunal de César ; c'est là que je dois être jugé… J'en appelle à César ! » (Ac 25,10-11) – César était devenu un titre honorifique donné à l’Empereur –. Alors Festus, après en avoir discuté avec son conseil, répondit : « Tu en appelles à César, tu iras devant César. » (Ac 25,12) Le quatrième procès se déroula devant le Roi Agrippa II et Bérénice. Paul fit un discours devant le Roi et son épouse, le Procurateur et l’assemblée. Agrippa, Bérénice, et Festus se dirent : « Cet homme n’a rien fait qui mérite la mort ni les chaînes » (Ac 26,31) Le Roi conclut en disant : « On aurait pu relâcher cet homme, s’il n’en avait appelé à César. » (Ac 26,32)
« Quand notre embarquement pour l'Italie eut été décidé, on remit Paul et quelques autres prisonniers à un centurion de la cohorte Augusta, nommé Julius. Nous montâmes à bord d'un vaisseau d'Adramyttium qui allait partir pour les côtes d'Asie, et nous prîmes la mer. » (Ac 27,1-2) Départ de Césarée, puis Sidon, les côtes chypriotes, l’Asie Mineure, la Crète, Malte : ce fut une traversée longue et mouvementée ! Je vous invite à lire le récit de cette « épopée » en Ac 27,1-28,10.
Après trois mois, ce fut Syracuse en Sicile, Rhegium (Reggio en Calabre) et Puteoli (Pozzuoli, Pouzzolles en Campanie). Paul eut la joie d’y être accueilli par des frères pendant sept jours.
Puis ce fut l’arrivée aux portes de Rome. « Les frères de cette ville, informés de notre arrivée, vinrent à notre rencontre jusqu'au Forum d'Appius et aux Trois-Tavernes. En les voyant, Paul rendit grâces à Dieu et reprit courage. » (Ac 28,15) Quand ils furent entrés dans la Ville, on permit à Paul de loger en son particulier avec le soldat qui le gardait. C’était l’an 61. Il passera deux années en résidence surveillée, au cœur de Rome, près du Tibre (l’actuel quartier juif entre le Fleuve et le « Teatro Marcello »). Il employa ce temps à évangéliser et à écrire.
Il trouva aussi une communauté de Chrétiens dont on ignore l’origine et dont Luc écrit qu’elle était nombreuse, et célèbre pour sa foi et ses œuvres. Depuis la mort de l’Empereur Claude, Rome comptait environ 50 000 Juifs venus de régions très diverses, dispersés à travers la vaste agglomération, en plusieurs synagogues.
Le premier geste de Paul dans la capitale de l’Empire, et ses dernières paroles, consignées dans les Actes, ont été de lancer - encore une fois - un appel aux Juifs. Comme il l’avait écrit aux Romains : « l’Évangile est une force pour tout homme qui croit, du Juif d’abord, puis du Grec » (Rm 1, 16). Aussi, au terme de sa mission, celui que le Seigneur avait fait « Apôtre des Nations » ne voulait pas oublier ses frères. « C’est à cause de l’espérance d’Israël que je porte les chaînes que voici. » (Ac 28,21) Il lança un dernier et vibrant appel à la « conversion » de son peuple.
Mais, dans le Christ, l’Alliance de Dieu était désormais ouverte à tous.
Je pense tout naturellement à ces mots de Paul dans sa Lettre aux Philippiens : « Pour moi, certes, la Vie c'est le Christ et mourir représente un gain. » (Ph 1,21)
Après l’incendie de Rome en 64, l’Empereur Néron, menacé, accusa Paul d’être un chef de la rébellion. Il fut arrêté, enchaîné à la « Prison Mamertinum » (« Carcere Mamertino »), près du Forum. Ce lieu existe toujours. Aujourd’hui surmonté d’une église, « Saint Joseph Artisan » (« San Giuseppe Falegname »), il est « gardé » par des Oblats de la Vierge Marie. Saint Pierre y fut aussi incarcéré, ainsi que Jugurtha (160-104 avant Jésus-Christ), Roi de Numidie et Vercingétorix, Chef gaulois (72-46 avant Jésus-Christ). On peut venir s’y recueillir.
Citoyen romain, Paul aura le triste « privilège » d’être condamné à la décapitation. Celle-ci aura lieu hors de la muraille aurélienne, sur la via Ostiense, sans doute entre 65 et 67. Une église commémore le martyr de Paul : « San Paolo alle Tre fontane » (« Saint-Paul-aux-Trois-fontaines »). Une légende raconte que la tête coupée de l’Apôtre aurait rebondi trois fois sur le sol et fait jaillir trois sources.
Le mot de la fin n’est pas la mort de Paul, car il s’agit au contraire de l´essor du christianisme et de la Bonne Nouvelle que porta haut et fort le grand témoin du Ressuscité, devenu à son image Lumière des nations – « je t’ai établi lumière des nations, pour que tu portes le salut jusqu’aux extrémités de la terre. » (Is 49,6 dans Ac 13, 47).
Avec les Apôtres Pierre et Paul, Colonnes inébranlables de la Foi Chrétienne, l’Eglise née à Jérusalem est devenue Catholique (c’est-à-dire universelle) à Rome.
Les Lettres de saint Paul
En bref, si vous désirez approfondir votre connaissance sur Paul, il vous faut lire ses 13 Lettres, même si, d’après les spécialistes bibliques, elles ne sont pas toutes de lui. Cependant, sept d’entre elles dont nous sommes quasiment sûr qu’il en est l’auteur sont pour nous une source exceptionnelle. Il faut préciser aussi que ces Epîtres sont les écrits les plus anciens du Nouveau Testament. On y trouve même des hymnes de la première liturgie chrétienne.
Ces Lettres de Paul sont nées et se sont développées en général par le besoin de compléter la prédication orale que Paul avait tenue dans les diverses communautés chrétiennes. C’était aussi un moyen pour répondre à des interrogations et éclairer des situations nouvelles. Dans nos Bibles, les Epîtres pauliniennes se présentent dans cet ordre : Romains ; 1 et 2 Corinthiens ; Galates ; Ephésiens ; Philippiens ; Colossiens ; 1 et 2 Thessaloniciens ; 1 et 2 Timothée ; Tite ; Philémon. Du point de vue historique et chronologique, l’ordre est différent.
La plus longue parmi les Lettres pauliniennes est celle aux Romains, qui est même la plus importante pour comprendre la pensée de Paul sur la justification du pécheur par l’œuvre de Dieu, au moyen de la rédemption du Christ et du don de l´Esprit. Il approfondit même les rapports et les différences entre hébraïsme et christianisme ; en même temps il en éclaircit chaque différence religieuse, raciale, pour qu’elle soit dépassée dans la foi en Christ. La communauté de Rome n´a pas été fondée par Paul, toutefois il pensait s’y rendre pour compléter sa mission d´Apôtre des païens. Pour cela il la fit précéder d’un exposé systématique de sa doctrine sur la justification et sur la vie dans le Christ et dans l’Esprit, qu’il avait déjà eu l’occasion d´exposer en mode plus synthétique et polémique dans une autre Lettre, celle aux Galates. La lettre aux Romains semble avoir été envoyée de Corinthe où Paul s’était rendu pour une collecte en faveur de l’Eglise-Mère, vers 58 après Jésus-Christ, puis de là il se rendit à Jérusalem, pour ensuite aller vers Rome.
Les Première et Deuxième Lettres à Timothée et celle à Tite sont appelés des « Lettres pastorales ». En effet, elles ont pour objectif le gouvernement de la communauté ecclésiale. Ces lettres réfléchissent une situation ecclésiale plus développée, qui les caractérise par conséquent avec encore plus d´évidence comme œuvre que la tradition paulinienne. Elles se préoccupent de donner des directives sur l´organisation des communautés locales et sur la lutte contre les faux maîtres qui bouleversent leur foi. De là, l´engagement « à garder » le dépôt de la foi, la saine doctrine, et à former de dignes ministres. L´envoi de ces lettres à Tite et à Timothée, disciples directs et précieux de Paul, entend donner un prestige à l´enseignement qu’ils proposent. Dans la Deuxième Epître à Timothée, le « testament spirituel » de l´apôtre est tracé de façon personnalisée et émouvante : « Quant à moi, je suis déjà répandu en libation et le moment de mon départ est venu. J'ai combattu jusqu'au bout le bon combat, j'ai achevé ma course, j'ai gardé la foi. Et maintenant, voici qu'est préparée pour moi la couronne de justice, qu'en retour le Seigneur me donnera en ce Jour-là, lui, le juste Juge, et non seulement à moi mais à tous ceux qui auront attendu avec amour son Apparition. » (2 Tm 4,6-8)
Paul peut être un exemple pour nous, Chrétiens du XXI° siècle.
Paul au caractère entier, souvent intransigeant, sans compromission, mais infiniment passionné du Christ, enflammé de vraie charité, généreux, courageux, intrépide… attachant ! Dieu a choisi cet homme de Tarse pour en faire un Apôtre de l’Evangile. Que la force, l’énergie et l’audace qui ont animé l’action de Paul animent aussi nos pensées et nos actes au service du Christ ressuscité et de son Eglise !
La Basilique Saint-Paul-hors-les-Murs
Après avoir parlé de saint Paul, d’avoir mis nos pas dans les siens, je vous invite à une petite visite de la Basilique qui lui est dédiée.
C’est un fait, lorsqu’on pénètre dans la Basilique, on est littéralement ébloui ! L’atmosphère qui s’en dégage est très différente de celle de Saint-Pierre. On pourrait presque dire de la Basilique Saint-Paul qu’elle se mérite ! Déjà, il faut y aller exprès, en métro, en bus ou en voiture. Si l’on arrive par la façade occidentale, on est happé par une gigantesque colonnade en carré. Saint Paul, en une monumentale et impressionnante statue dressée au milieu du quadriportique, vous accueille, magistral, sévère, intimidant, majestueux, solennel, hiératique… magnifique !
L’édifice constantinien
L´Empereur Constantin, qui régna de 306 à 337, mit fin à la persécution contre les Chrétiens, en proclamant notamment l’Edit de Milan, en 313, qui donnait la liberté de culte pour tous. Il fit fouiller les lieux où les Chrétiens vénéraient la mémoire de l’Apôtre Paul. Au-dessus de la tombe, il fit édifier un lieu de culte, dont l’exiguïté fait penser qu’existait à cet endroit la structure d’une « domus ecclesiae », une « église domestique ». La basilique fut consacrée le 18 novembre 324 par le pape Sylvestre I° (314-335)*. On peut voir au sol, depuis les grands travaux de 2006, l’abside orientée vers l’est, selon la coutume.
La grandiose Basilique des trois empereurs
Pour permettre l´agrandissement de la Basilique devenue trop petite devant l´afflux de pèlerins, on changea son orientation, d´est en ouest. Avec ses cinq nefs soutenues par une « forêt » de 80 colonnes monolithes de granit, et son quadriportique (long de 70 m), elle était alors la plus grande des quatre Basiliques romaines, jusqu’à la réédification de Saint-Pierre.
Les travaux au cours des siècles
Témoignant de l’amour de l’Église pour ce lieu, les Papes n’ont cessé de le transformer, le restaurer et l’embellir par l’ajout de fresques, mosaïques, peintures ou chapelles, au fil des siècles.
Léon le Grand (440-461)* fit couvrir de mosaïques l´arc triomphal et reconstruire la toiture incendiée. Il entreprit également la longue série des Papes de l’histoire faite de grands médaillons de mosaïque formant une haute frise tout autour du transept et de la nef – on peut la trouver en poster –.
C’est à Grégoire II (715-731)* que l’on doit la présence stable de Moines Bénédictins près du tombeau de l’Apôtre.
Saint Grégoire VII (1073-1085)*, abbé du monastère adjacent avant d’être élu Pape, fit rehausser le pavement du transept, le raccordant à la nef, élever un campanile (détruit au XIX° siècle), tandis que l’entrée principale de la Basilique était dotée d’une splendide porte byzantine, composée de cinquante-quatre panneaux gravés en damasquinage d´argent (incrustation de filets de métal précieux sur une surface métallique).
Innocent III (1198-1216)* fit recomposer la grande mosaïque de l’abside (24 m de large sur 12 m de haut), telle qu’elle se présente à nos yeux aujourd’hui. Le pape Honorius III (1216-1227)* compléta l´équipe des mosaïstes par des artistes vénitiens qui œuvrèrent à Saint-Marc de Venise.
Les apports artistiques furent donc nombreux, tels le dais gothique (appelé aussi Ciborium) d’Arnolfo di Cambio au-dessus de l’autel papal et de la Tombe, l’ornementation de la façade de Pietro Cavallini, le cloître des Vassaletto, et le superbe candélabre pascal (5,60 m) de Nicola d´Angelo et Pietro Vassalletto.
La Basilique était alors non seulement un haut-lieu de pèlerinage, mais un « laboratoire d’idées » pour les artistes paléochrétiens, byzantins et gothiques, universellement reconnus.
A partir du XIV° siècle, la pratique des Jubilés attira des pèlerinages au tombeau de l’Apôtre. Les Papes entreprirent à ces occasions de grands travaux. Boniface IX (1389-1405)*, puis Martin V (1417-1431)* invitèrent les fidèles à faire dans ce but des offrandes, les assortissant d’indulgences, liées à la prière et à la pénitence. Grégoire XIII (1572-1585)*, fit ajouter la balustrade autour de la tombe pour le jubilé de 1575. Clément VIII (11592-1605)* fit surhausser l’autel majeur pour le jubilé de 1600.
Benoît XIII (1724-1730)* confia, pour le jubilé de 1725, la construction d´un nouveau portique à Antonio Canevari, qui démolit l´antique narthex. Autels et chapelles s’ouvrant sur le transept firent de la Basilique un témoin de l’art baroque.
L´incendie de la nuit du 15 au 16 Juillet 1823
En une nuit, la Basilique fut la proie des flammes. Un très large appel fut aussitôt lancé par le Pape Léon XII (1823-1829)* à tous les fidèles.
La Basilique fut reconstruite à l’identique, réemployant les éléments épargnés, afin que soit préservée l´expérience chrétienne des origines. On a déplacé, restauré, démoli, reconstruit… Non seulement les catholiques répondirent en masse mais des dons arrivèrent aussi du monde entier, comme les blocs de malachite et de lapis lazuli, cadeaux du Tsar Nicolas I° qui serviront pour les deux somptueux autels latéraux du transept, ou les colonnes et les fenêtres d’albâtre très fin, don du Roi Fouad I° d’Égypte… Ce fut le plus grand chantier de l’Église de Rome au XIX° siècle !
Le 10 décembre 1854, le Pape Pie IX (1846-1876)* consacra la « nouvelle » Basilique en présence des très nombreux cardinaux et évêques, venus du monde entier, à Rome, pour la proclamation du dogme de l´Immaculée Conception.
Le Quadriportique, long de 70 m et comportant 146 colonnes, prévu par Poletti, fut achevé par Calderini. Au centre, se trouve, comme je l’ai écrit en début d’article, la statue colossale de saint Paul, œuvre de Giuseppe Obici (1807-1878).
La Façade fut décorée de mosaïques exécutées entre 1854 et 1874 représentant : au registre inférieur, les Prophètes Isaïe, Jérémie, Ezéchiel et Daniel ; au milieu, l’Agneau mystique entouré de quatre fleuves symbolisant les quatre Évangiles, et de douze agneaux représentant les douze apôtres ; et au registre supérieur, le Christ entre Pierre et Paul.
Un Archiprêtre a été nommé en la personne du Cardinal Andrea Cordero Lanza di Montezemolo qui a mis en chantier une série de grands travaux.
Aujourd´hui comme au cours des siècles, ceux-ci dépendent de la générosité et des dons des fidèles et des pèlerins des quatre coins du monde.
En décembre 2006, le Cardinal-Archiprêtre a présenté, à l’issue de quatre ans de fouilles, le sarcophage de marbre grossier désormais accessible au-dessous de l’autel papal, ainsi que le mur de l’abside paléochrétienne, visible sous une dalle transparente.
L’Abbaye Saint-Paul-hors-les-Murs
Saint-Paul-hors-les-Murs est une abbaye bénédictine dont les origines s’identifient à la basilique du même nom. Conjointement à la basilique, elle a donc vécu les événements heureux et difficiles de l’histoire et les vicissitudes humaines.
La première attestation de l’existence d’une communauté monastique à la basilique de Saint-Paul est inscrite dans le « Praeceptum » de marbre de saint Grégoire le Grand (590-604)* qui se trouve aujourd’hui au musée lapidaire paulinien. Mais le saint pontife Grégoire II (cité plus haut) peut être considéré comme le vrai fondateur du monastère.
Les monarques anglais, dont les sujets avaient été convertis à la foi catholique par des moines bénédictins menés par saint Augustin de Cantorbéry († 604), exercèrent, au Moyen-Age, la fonction de protecteurs de l’Abbaye de Saint-Paul. Les anciens blasons des abbés de Saint-Paul, en effet, ont une courroie de cuir avec la devise : « Honni soit qui mal y pense », entourant le classique bouclier avec l’épée.
Malgré les vicissitudes de l’Histoire, nous pouvons affirmer que les Moines n’abandonnèrent jamais leur fonction auprès du célèbre sépulcre de l’Apôtre des Gentils. La pleine reprise de la vie monastique et économique de l’Abbaye de la « Via Ostiense » » commença à la fin du XIX° siècle et se poursuivit durant le XX°.
Aujourd’hui, les Bénédictins de Saint-Paul-hors-les-Murs s’appliquent à accomplir la charge que leur confia anciennement le Pape : celle d’être les gardiens de la Tombe de saint Paul, tout en promouvant le charisme œcuménique propre à la Basilique, et en offrant un service de « pastorale monastique » à tous les fidèles et pèlerins qui fréquentent, avec ferveur et dévotion, la Basilique de l’Apôtre des Nations.
* les dates sont celles du pontificat
La Basilique Saint-Paul-hors-les-Murs
Citoyen romain, Paul fut donc condamné à la décapitation. Il mourut entre 65 et 67 à Rome. Une église commémore le martyr de Paul : « San Paolo alle Tre fontane » (« Saint-Paul-aux-Trois-fontaines »). Une légende raconte que la tête coupée de l’Apôtre aurait rebondi trois fois sur le sol et fait jaillir trois sources, d’où le nom de l’église.
Son corps fut déposé à 3 Km du lieu de son martyre, dans la propriété que la chrétienne Lucina possédait sur la via Ostiense, près d’une nécropole. La tombe de Paul devint aussitôt objet de vénération. Au-dessus, on édifia une « cella memoriae » (mémorial) ou « tropaeum » (trophée), où fidèles et pèlerins vinrent, durant ces siècles de persécution, prier et puiser des forces pour poursuivre l’évangélisation du grand missionnaire.
À près de 1,50 m sous l´autel papal actuel, une plaque tombale de marbre porte l´inscription PAULO APOSTOLO MART… Elle est composée de plusieurs morceaux.
C’est au-dessus d’un massif sarcophage de 2,55 m de long sur 1,25 m de large et 1 m de haut que furent érigés les « autels de la Confession » successifs. Au cours des tout récents travaux, une large fenêtre a été pratiquée sous l´autel papal, permettant aux fidèles d´accéder au tombeau de l’Apôtre.
Prière à saint Paul
Glorieux saint Paul, Apôtre plein de zèle, Martyr par amour du Christ, obtiens-nous une foi profonde, une espérance ferme, un amour brûlant pour le Seigneur afin que nous puissions dire avec toi : « Ce n’est plus moi mais le Christ qui vit en moi. » Aide-nous à devenir des apôtres qui servent l’Eglise avec une conscience pure, des témoins de sa grandeur et de sa beauté au milieu des ténèbres de notre temps. Avec toi nous louons Dieu notre Père, « A lui la gloire, dans l’Eglise et dans le Christ pour tous les âges et tous les siècles. » Amen.
Litanies de Saint Paul :Charity of the Father, save us.
- Kyrie eleison. Kyrie eleison.
- Christ eleison. Christe eleison.
- Kyrie eleison. Kyrie eleison.
- Amour du Père, sauve-nous.
- Grace of our Lord Jesus Christ, vivify us.Grâce
de notre Seigneur Jésus-Christ, vivifie-nous.
- Communication of the Holy Spirit, sanctify us.Communication
de l'Esprit Saint, sanctifie-nous.
- Trinité Sainte, Un Seul Dieu, prends pitié de nous.Blessed Paul...
- Sainte Marie, Mère du Christ Sauveur, prie pour nous.
- Sainte Marie, Reine des Apôtres, prie pour nous.
- Saint Pierre et tous les Saints Apôtres, priez pour nous.
- Saint Paul de Tarse, prie pour nous.
- Saint Paul, renversé à terre, prie pour nous.
- Saint Paul, élevé par grâce, prie pour nous.
- Saint Paul, à qui le Fils de Dieu a été révélé, prie pour nous.
- You who obtained the mercy of God...Saint Paul, qui as obtenu la miséricorde de Dieu, prie pour nous.
- You
in whom the Son of God was revealed...You who were a vessel of election for
Christ...Saint Paul, vase d’élection pour le Christ, prie pour
nous.
- You who were made preacher, apostle and doctor
of the Gentiles in truth...Saint Paul, devenu Prédicateur et Docteur des
païens dans la vérité, prie pour nous.
- Saint Paul, Apôtre des Gentils, prie pour nous.
- Saint Paul, Apôtre des Nations, prie pour nous.
- Saint Paul, qui You who gave the nations the Gospel of Christ and your very life...qui qui as donné aux Nations l'Evangile du Christ, prie pour nous.
- Saint Paul, qui n’as pas épargné ni tes forces ni ta vie, prie pour nous.
- Saint Paul, Gardien de la foi, prie pour nous.
- Saint Paul, infatigable « marcheur de Dieu », prie pour nous.
- Saint Paul, M You who were a most faithful minister of the Church...Ministre fidèle de l'Eglise, prie pour nous.
- Saint Paul, You in whom Christ lived and spoke...en qui le Christ a vécu et a parlé, prie pour nous.
- Saint Paul, infiniment passionné du Christ, prie pour nous.
- Saint Paul,
You whom nothing could separate from the love of
Christ...enque rien ne pourrait séparer de l'amour du Christ, prie
pour nous.
- Saint Paul, You who carried the faithful in
your heart and in your chains...qui as porté fidèlement le Christ dans
ton cœur, prie pour nous.
- Saint Paul, You who were taken into Heaven
while still living on earth...qui étais ravi au ciel tout en vivant sur
la terre, prie pour nous.
- Saint Paul,
You who were crucified with Christ...quiqui
as été crucifié spirituellement avec le Christ, prie pour nous.
- Saint Paul, You who underwent imprisonment and
toil... qui as subi tant d’outrages et de blessures, prie pour
nous.
- Saint Paul, You who underwent imprisonment and toil... qui as supporté l'emprisonnement plusieurs fois, prie pour nous.
- Saint Paul, décapité en témoignage de ta foi au Christ, prie pour nous.
- Lamb
of God, who converted the persecutor Paul,Agneau de Dieu, qui as converti
le persécuteur Paul, spare us.pardonne-nous,
Seigneur.
- Lamb of God, who crowned the apostle Paul,Agneau
de Dieu, qui as couronné l'Apôtre Paul,
graciously hear us.exauce-nous, Seigneur.
- Lamb of God, who glorified the martyr Paul,Agneau
de Dieu, qui as glorifié le Martyr Paul, have
mercy on us. Aies pitié de nous, Seigneur.
V. You
are a vessel of election, St. Paul the Apostle.V/ Prie pour nous saint
Paul, Apôtre des Nations et Colonne de l’Eglise.
R. Preacher of truth throughout the world.R/
Afin que nous soyons dignes des promesses du Christ.
Prions :
Let Us PrayPrionsPPPPPPPPPPPPPPPP
Dieu tout-puissant, par la parole de l’Apôtre saint Paul, tu as instruit le monde entier. Accorde-nous d’aller vers toi en cherchant à lui ressembler, et d’être, dans le monde, les témoins de l’Evangile. Et que la force, l’énergie et l’audace qui ont animé l’action de Paul animent aussi nos pensées et nos actes au service du Christ ressuscité et de son Eglise. Lui qui règne avec toi et le Saint-Esprit, maintenant et pour les siècles des siècles.
R/ Amen.