« Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (Ac 5,29)
Bienheureux Franz Jägerstätter
Martyr pour la Vérité
(1907-1943)
Il ne faut pas croire que tous les Allemands et tous les Autrichiens étaient pro-nazis ! Prouvant même le contraire, des hommes et des femmes, au péril de leur vie, ont élevé leur voix pour condamner Hitler et sa politique dévastatrice ! Mais de toute façon, nous n’avons pas à juger qui que soit, ni dans un camp, ni dans l’autre ! En effet, qu’aurions- nous fait, nous, en France, pendant cette tragique période ? Nul ne le sait ! Arrêtons de jauger les choses avec nos yeux et nos consciences d’aujourd’hui !
Le seul combat qui compte, c’est celui pour le Christ et pour la Vérité !
Le 26 octobre 2007 donc, à Linz, ville du nord de l'Autriche, sur le fleuve Danube, et capitale de l'État de Haute-Autriche (Oberösterreich), un père de famille, objecteur de conscience, opposé à Hitler, a été béatifié. Il s’agit de Franz Jägerstätter. La Messe de Béatification fut présidée par le Cardinal José Saraiva Martins, au nom du pape Benoît XVI. Ce dernier avait autorisé la Congrégation pour la Cause des Saints à publier un décret reconnaissant Franz Jägerstätter comme « martyr ». « Il a donné sa vie, la conscience honnête, en fidélité à l'Evangile et pour le respect de la personne humaine », a déclaré le Cardinal.
Franz Jägerstätter est né le 20 mai 1907 à Sankt Radegund (Sainte-Radegonde), près de Salzbourg. Franz fut un jeune comme les autres, qui aimait s'amuser, courtiser les filles, conduire une moto… Il eut un enfant alors qu'il n'était pas marié. Toutefois, sa foi devint plus profonde et il devint plus religieux après son mariage avec Franziska. On peut encore voir aujourd’hui, dans sa maison, son chapelet, son livre de prière… Il vivait comme un fermier autrichien typique. Outre ses tâches à la ferme et autour de la maison, il était devenu sacristain à l’église de son village. Il était reconnu pour sa diligence et son dévouement. Il fut le père de trois filles.
En 1938, il avait été le seul de son village à voter contre le rattachement de l'Autriche au IIIème Reich : l'Anschluss.
« Ma vision catholique du monde est incompatible avec le national-socialisme. »
Après une brève période de formation militaire, il ne voulut adhérer à aucune organisation politique et manifesta ouvertement son opposition au nazisme.
En union avec les évêques catholiques du Reich, il avait pris parti contre le programme nazi d’élimination des handicapés.
En 1940, alors qu'il avait 33 ans, il fut conscrit dans les forces allemandes et suivit l'entraînement de soldat. De retour chez lui en 1941, exempté du service parce qu'il était fermier, il commença à examiner de près les motifs religieux pour refuser le service militaire forcé. Dans cette démarche, il avait l’approbation et le soutien de son épouse. En 1943, il dut se retourner à sa base militaire où il affirma son refus de servir : « Mieux vaut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. » (Ac 5,29)
Un tribunal militaire rejeta son assertion qu'il ne pouvait à la fois être nazi et catholique, et le condamna à mort au motif de miner la morale militaire. On ignora son offre de servir en tant qu'ambulancier. Son refus de servir l'armée nazie ne trouva l'appui ni de son curé, ni de son évêque ou de la plupart de ses amis catholiques. Parce qu'il avait une femme et trois filles, beaucoup lui conseillèrent de penser à sa famille et de laisser de côté ses objections de conscience à la machine de guerre nazie. Il fut d’abord emprisonné à Linz puis à Berlin.
« Ni la prison, ni les chaînes et non plus la mort peuvent séparer un homme de l'amour de Dieu et lui voler sa libre volonté. La puissance de Dieu est invincible. » (tiré des notes écrites en prison dans la période après sa condamnation).
Tôt le 9 août 1943, Franz Jägerstätter fut amené de Berlin au camp de concentration de Brandebourg-Havel. À la mi-journée, on lui dit que sa condamnation à mort par un tribunal militaire pour « obstruction aux principes de la Wehrmacht » et pour avoir « délibérément refusé, pour des raisons personnelles, de remplir son devoir patriotique dans la difficile lutte engagée par l'Allemagne pour sa survie » était confirmée et exécutée le même jour, à 16h.
Il avait écrit peu avant de mourir : « Je suis convaincu qu'il vaut mieux dire la vérité, même si je dois payer au prix de ma vie… Peut-on être en même temps soldat du Christ et soldat pour le national-socialisme, peut-on combattre pour la victoire du Christ et de son Église et en même temps pour la victoire du national-socialisme ?… Si Dieu ne m'avait pas accordé sa grâce et la force de mourir, si nécessaire, pour défendre ma foi, je ferais peut-être simplement ce que fait la majorité des gens. Dieu peut en effet accorder sa grâce à chacun comme Il le désire. Si d’autres avaient reçu les nombreuses grâces que j'ai reçu, ils auraient peut-être fait des choses bien meilleures que moi. »
Cet après-midi-là, à 16h, Franz mourut en véritable martyr de la foi, décapité, le premier d’une quinzaine de victimes, pour son refus de servir le IIIème Reich. Trois ans plus tard, ses restes furent ramenés dans sa terre natale et il fut enterré près de son église paroissiale de Sainte-Radegonde.
Rappelons-nous les paroles de Jésus :
« Celui qui aura rougi de moi et de mes paroles en cette génération adultère et pécheresse, le Fils de l'homme aussi rougira de lui. » (Mc 8,38) « Celui qui se prononcera pour moi devant les hommes, moi aussi je me prononcerai pour lui devant mon Père qui est aux cieux. Mais celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi je le renierai devant mon Père qui est aux cieux. » (Mt 10,32-33).
Oui ! Demandons au Bienheureux Franz Jägerstätter de savoir choisir dans nos vies le Christ avant tout ! Qu’il nous donne sa force, sa joie et son courage de dire la Vérité du Christ contre les mensonges du monde ! Qu’il nous apprenne à nous battre pacifiquement pour la dignité de l’être humain, dans notre pays et ailleurs !
Quelques textes du Bienheureux Franz Jägerstätter tirés des notes écrites en prison dans la période après sa condamnation :
« J'écris seulement quelques mots, comme cela me sort du cœur. J'écris avec les mains liées, mais il vaut mieux ainsi que si la volonté était enchaînée. Parfois Dieu nous montre ouvertement sa force, qu'il donne aux hommes qui l'aiment et qui ne préfèrent pas la terre au ciel. »
« Si on se consacrait avec la même assiduité avec laquelle on a essayé de me sauver de la mort terrestre, à mettre en garde chaque homme contre le péché mortel, et donc contre la mort éternelle, il y aurait déjà le paradis sur terre. »
« Il y a toujours ceux qui tentent de t'opprimer la conscience en te rappelant l'épouse et les enfants. Est-ce que les actions qu'on accomplit deviennent plus justes seulement parce qu'on est marié et on a des enfants ? Ou alors est-ce que l'action devient meilleure ou pire seulement parce que l'accomplissent d'autres milliers de catholiques ? Est-ce que fumer est devenu une vertu parce que fument des milliers de catholiques ? Est-ce qu'on peut donc mentir parce qu'on a femme et enfants et en outre le justifier à travers un serment ? Christ lui-même a dit : « Qui aime sa femme, sa mère et ses enfants plus que moi, n'est pas digne de moi ». Pour quelle raison nous prions Dieu et les sept dons de l'Esprit Saint, si nous devons de toute façon prêter une aveugle obéissance ? Pour quelle raison Dieu aurait-il fourni les hommes d'une intelligence et d'une volonté libre si on ne nous accorde même pas, comme on l'affirme, de juger si cette guerre que l'Allemagne est en train de mener est-elle juste ou injuste ? À quoi bon donc de savoir distinguer entre bien et mal ? »
« Je crois que l'on peut prêter obéissance aveugle, mais seulement dans les cas où on ne cause aucun dommage à personne. Si aujourd'hui les hommes étaient un peu plus sincères, il devrait exister aussi quelques catholiques pour dire : “Oui, je me rends compte que ce que nous sommes en train d'accomplir n'est pas bien, cependant je ne me sens pas encore prêt à mourir”. »
« Un saint a dit : “Même si un seul mensonge prononcé pour s'adapter aux circonstances, pouvait permettre d'éteindre tout le feu de l'enfer, il ne faudrait pas le prononcer parce qu'en mentant, même par nécessité, on porte offense à Dieu”. Quelqu'un pourra penser que des considérations semblables au XXème siècle peuvent sembler ridicules. Oui c'est vrai, nous les hommes nous avons changé en beaucoup de choses, mais Dieu n'a pas enlevé un iota de ses commandements. Pourquoi veut-on tâcher toujours de renvoyer la mort, comme si on ne savait pas que tôt ou tard elle devra arriver ? Est-ce que nos saints se sont peut-être conduits ainsi ? Je ne crois vraiment pas. Ou peut-être nous doutons de la miséricorde de Dieu, comme si vraiment pouvait nous attendre l'enfer après notre mort. En réalité je l'aurais bien mérité avec tous mes nombreux et graves péchés, mais Christ n'est pas venu dans le monde pour les justes, mais pour chercher celui qui était perdu. Et afin qu'aucun pécheur ne puisse avoir des doutes, il nous en a donné son propre exemple en point de mort, en sauvant le bon larron. »
Fr. B