« Laissez venir à moi les petits enfants »

(Mc 10,14)

 

 

 

 

Découvrons ensemble quelques jeunes parvenus très tôt à un haut degré de sainteté.

 

En préparant cet article, il m’est venu spontanément à l’esprit ces quelques versets de l’Evangile : « On présentait à Jésus des enfants pour les lui faire toucher ; mais les disciples les écartèrent vivement. Voyant cela, Jésus se fâcha et leur dit : “Laissez les enfants venir à moi. Ne les empêchez pas, car le royaume de Dieu est à ceux qui leur ressemblent. Amen, je vous le dis : celui qui n'accueille pas le royaume de Dieu à la manière d'un enfant n'y entrera pas.” Il les embrassait et les bénissait en leur imposant les mains. » (Mc 10,13-16)

 

Proclamer « Bienheureux » ou « Bienheureuse », « Saint » ou « Sainte » un enfant n’est pas si aisé. L’héroïcité des Vertus chez des enfants, ou plutôt, des préadolescents, depuis l’usage de la raison jusqu’à l’âge de la puberté, avait d’ailleurs été le thème d’une Assemblée Plénière organisée par la Congrégation pour les Causes des Saints, qui s’était tenue à Rome en 1981.

Son Préfet, le Cardinal Pietro Palazzini, avait déclaré :

« Il est clair que l’héroïcité implique la parfaite fidélité aux devoirs de l’état propre, et cela oblige fondamentalement à une continuité, à une persévérance dans la vertu. Et c’est précisément cela la condition difficile à vérifier dans le cas d’un enfant, à cause de la brièveté de sa vie… Il n’échappe à l’attention de personne que le problème est plus facile à solutionner quand il s’agit d’enfants martyrs. Pour l’acceptation du martyr, l’usage de la raison est suffisant. D’ailleurs, l’hagiographie connaît des cas d’enfants vénérés comme martyrs. Outre les Saints Innocents, dont la fête remonte, semble-t-il, au V° siècle, la béatification des deux cent cinq martyrs japonais compte quinze enfants entre douze et treize ans, et un de deux ans. Cela pose davantage problème lorsqu’il s’agit de la béatification et de la canonisation d’enfants comme Confesseurs (Chrétiens vivant et proclamant leur foi). Le plus jeune dans le catalogue des saints canonisés est actuellement Saint Dominique Savio : quatorze ans, onze mois et sept jours. Peut-on descendre en dessous de ce niveau, et de combien, pour le calcul des années ? »

 

 

 

Les Jeunes Martyrs

 

 

Saint Tarcisius († début du IV° siècle)

 

Comment parler de jeunes martyrs sans mentionner Tarcisius ?

Vérité et Légende se mêlent. Il nous est connu grâce à  une inscription du pape saint Damase (IV° siècle) sur une tombe. Tarcisius serait un jeune garçon qui assistait les prêtres lors de la célébration de l’Eucharistie. Il était « acolyte », c’est-à-dire servant d’autel ou enfant de chœur. En ces temps de persécution, de nombreux chrétiens avaient été arrêtés et devaient être livrés aux fauves. Cependant, à la veille du supplice, la surveillance se faisait moins sévère et les prisonniers pouvaient recevoir des visites. C’est ainsi que Tarcisius reçut la mission de leur porter les « Saintes Espèces », précieusement enveloppées dans un linge, afin que les condamnés puissent communier une dernière fois avant de mourir. Sur sa route, il rencontra des camarades d’école qui, au début sans penser à mal, lui demandèrent de se joindre à eux pour jouer. Il refusa. Intrigués d’abord, puis furieux de son refus, ses camarades voulurent s’emparer de ce qu’il portait avec tant de soin sur son cœur. Tarcisius refusant d’ouvrir les bras, quelqu’un prononça le mot fatidique : « Ce doit être un chrétien ! » Ses camarades alors se déchaînèrent et se mirent à lui jeter des pierres... Un centurion chrétien passant par là réussit à mettre les garnements en fuite et recueillit le dernier soupir de l’enfant. Nouveau saint Etienne (c’est ainsi que le pape Damase le désigna), Tarcisius est mort lapidé pour protéger le Corps du Christ qu’il portait toujours sur son cœur et leur éviter toute profanation.

Il est devenu le Saint Patron des enfants de chœur.

 

Saint Tarcisius (marbre d’A. Falguière, 1868)

Photo Fr. Bruno, août 2009

 

 

 

Saint Pancrace († 304)

 

Célébré le 12 mai, Pancrace est un jeune martyr chrétien des premiers siècles. Originaire de Phrygie, Pancrace était encore un tout jeune orphelin lorsqu'il vint à Rome en compagnie de son oncle. Converti au christianisme par le pape Corneille, le jeune garçon fut rapidement dénoncé comme chrétien. Sur l'ordre de l'empereur Dioclétien, saint Pancrace fut décapité en 304 ; il avait alors quatorze ans. Son culte devint très vite populaire ; saint Pancrace incarnait l'innocence et la pureté de l'enfant qu'il était lorsqu'il fut martyrisé. A Rome, une Basilique, tenue par des Carmes, porte son nom. Elle fut construite par Symmaque, pape de 498 à 514, sur le lieu de sépulture du jeune Pancrace. On y trouve aussi des Catacombes. L’édifice se situe sur la colline du Gianicolo, près du parc de la Villa Doria Pamphili, non loin de la Maison Générale des Oblats de la Vierge Marie.

 

Saint Pancrace

www.levangileauquotidien.org/main.php?languag...

 

 

 

Sainte Maria Goretti (1890-1902)

 

Cette jeune martyre est plus proche de nous dans le temps. Maria Goretti naquit en 1890 à Corinaldo, région montagneuse de la Province d'Ancône (Région des Marches), d'une famille de cultivateurs. La pauvreté les poussa à émigrer non loin de là dans les Marais Pontins, encore insalubres, à Nettuno, au diocèse d'Albano. Elle n'avait que dix ans lorsque son père mourut de la malaria. Elle s'occupa alors de ses cinq frères et sœurs tandis que sa mère travaillait aux champs. C'est dans l'Eucharistie et la communion fréquente qu'elle venait puiser consolation et réconfort, tant pour son travail que pour vivre en chrétienne. Elle priait sans cesse, avec une prédilection pour le chapelet qu'elle tenait toujours enroulé autour de son poignet. « Pourquoi pries-tu tant ? » lui demanda un jour une amie. « Je prie pour consoler Jésus et Marie de tant de péchés » répondit-elle en se mettant à pleurer. Elle n'avait pas tout à fait douze ans lorsqu'un jeune homme, Alessandro, habitant la même ferme se mit à la solliciter. Exaspéré par la résistance de Maria, il finit par la menacer d'un poinçon puis la frappa avec cette arme à plusieurs reprises. Maria mourut le lendemain, 6 juillet 1902, après avoir pardonné à son agresseur. Une foule immense assista à sa canonisation par le pape Pie XII en 1950. Dans l’assemblée, se trouvaient sa mère et son meurtrier converti… Maria Goretti, martyre de la pureté, est fêtée le 6 juillet.

 

Sainte Maria Goretti

anluwage-ie.blogspot.com/2008/07/santa-maria-...

 

 

 

 

Jeunes Confesseurs

 

 

Bienheureuse Laura Vicuña (1891-1904)

 

En 1986, dans un numéro du journal « L’Osservatore Romano » était publiée l’information suivante : « Congrégation pour les Causes des Saints. Aujourd’hui, 5 juin 1986, en présence du Saint Père, ont été promulgués sept décrets qui se réfèrent à… ». Suivait la liste de trois décrets de miracles attribués à l’intercession de tant de Vénérables, et de quatre décrets de Vertus Héroïques de quatre Serviteurs de Dieu. Le dernier était ainsi rédigé : « Les Vertus Héroïques de la Servante de Dieu, Laura Vicuña, laïque, élève de l’Institut des Filles de Marie Auxiliatrice ; née à Santiago le 5 avril 1891, et morte à Junin des Andes le 22 janvier 1904 ». En ces dernières années où l’Eglise nous propose, en exemples de sainteté, la vie d’hommes et de femmes de toutes conditions et de tous horizons, sous des formes si nombreuses et variées, la nouvelle n’aurait rien d’extraordinaire, sauf pour une circonstance qui certainement aura passée inaperçue à beaucoup. Laura Vicuña vécut seulement douze ans, neuf mois et dix-sept jours ! Il s’agissait donc d’un décret qui, promulgué en présence du Saint Père, déclarait qu’une petite fille de moins de treize ans avait pratiqué « à un degré héroïque, les Vertus Théologales de Foi, d’Espérance et de Charité, envers Dieu et envers son prochain, et les Vertus Cardinales de prudence, de justice, de tempérance, de force, et les autres liées à elles ». Elle fut béatifiée en 1988 par le pape Jean-Paul II. Soulignons le fait aussi qu’elle n’est pas morte martyre.

Laura est né le 5 avril 1891 à Santiago du Chili, premier enfant de José Domingo Vicuña et de Mercedes del Pino. Sa sœur Giulia Amandina naîtra en 1893, année aussi de la mort de leur père. Mercedes quitta le Chili et émigra en Argentine avec les deux fillettes. Elle trouva refuge auprès de Manuel Mora, un riche propriétaire, dont elle devint la maîtresse, à Norquin. Le 21 janvier 1900, Laura et Amanda furent internes au Collège des Sœurs Salésiennes de Don Bosco, à Junin. Très tôt, Laura se distingua par le soin qu'elle mettait à faire ce qui lui était demandé, par la ferveur de sa piété, par son obéissance et sa charité envers ses compagnes. « Pour moi, c’est la même chose : prier ou travailler, jouer, dormir. » Laura fit sa première communion en 1901 et fut admise dans le groupe des Filles de Marie. Mais le propriétaire de la maison dans laquelle ils habitaient, et qui terrorisait toute la famille, s'attaqua à Laura, qui réagit avec courage.  En 1902, Laura offrit sa vie pour sa mère, tombée sous la coupe de cet homme violent, et qui avait abandonné la foi. Elle multiplia prières et pénitences pour obtenir sa conversion. Minée par la maladie, Laura mourut le 22 janvier 1904, à 12 ans et 9 mois, dans les bras de sa mère, qui retrouva alors la foi et le courage de s'enfuir à nouveau, loin de leur tortionnaire. La fête de la Bienheureuse Laura Vicuña est fixée au 22 janvier.

 

Bienheureuse Laura Vicuña

 

 

 

 

Tarcisius et Pancrace, Maria et Laura… Jeunes Saints et Saintes, Bienheureux et Bienheureuses, vous, Martyrs ou Confesseurs, donnez-nous un amour indéfectible pour le Christ, une charité toujours plus grande pour nos frères humains, apprenez-nous l’humilité du cœur, la persévérance dans les épreuves, le courage dans les souffrances et le triomphe dans la mort !

Fr. Bruno